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Édition du 28 octobre 2014
Bulletin Juridique du Groupe Dupuis Paquin
 

La clause de non-concurrence après la fin du lien d'emploi

Introduction


Tout employeur peut se prévaloir d’une clause de non-concurrence. Cette clause vise à interdire à l’ex-employé de concurrencer son ancien employeur. L’obligation de non-concurrence dont on traite ici subsiste donc après la fin du contrat de travail. Bien que très restrictive, elle est tout à fait légale, à certaines conditions.

 

La validité de la clause

On comprend qu’une telle clause nécessite une attention particulière lors de sa rédaction. En effet, la clause de non-concurrence dans un contrat de travail doit respecter plusieurs critères, sous peine d’être invalidée par la Cour. Il faut noter que le tribunal ne peut réduire la portée une telle clause; il la juge ou bien entièrement valide, ou bien entièrement invalide.

En plus des obligations de base du régime contractuel, la clause de non-concurrence doit inclure les éléments relatifs à la durée, au lieu et au genre du travail. D’abord, tous ces éléments doivent être clairs, précis et justifiés en rapport avec les intérêts légitimes de l’employeur. Ensuite, ils doivent être évalués en fonction de l’entreprise – employeur (taille, domaine d’activité, concurrence, marché, etc.) et le type d’emploi effectué par le salarié. Ainsi, plus le domaine d’activité de l’entreprise sera spécialisé ou plus le salarié aura un poste clé, plus la clause pourra être restrictive. Toutefois, la clause de non-concurrence ne peut habituellement empêcher l'employé de gagner sa vie en utilisant le savoir-faire acquis lors de son passage chez son ex-employeur.

En général, une clause prévoyant une limitation de six à douze mois est jugée raisonnable. Par contre, si elle excède douze mois, elle doit être justifiée par l’employeur, et elle ne devrait jamais dépasser les vingt-quatre mois, sauf exception. Il est à noter que la limitation ne devrait pas dépasser le temps requis pour remplacer efficacement l’employé.

La zone géographique prévue dans la clause doit être clairement déterminée. En effet, l’usage de termes tels que « la communauté de Montréal » ou « la région métropolitaine de Montréal » ont été considérés ambigus, invalidant de ce fait la clause. Évidemment, la clause sera aussi invalidée si la zone choisie est trop large ou abusive.

En ce qui concerne le genre de travail, il convient de spécifier le type de fonction visé par la clause de non-concurrence. Ainsi, on ne peut empêcher l’ex-employé d’occuper au sein d’un compétiteur une fonction non reliée à l’emploi précédent.

Quoi qu’il en soit, c’est à l’employeur de prouver la validité de la stipulation de non-concurrence, en vertu de la loi. De surcroît, le devoir de loyauté est interprété de façon restrictive par les tribunaux puisque la concurrence est la règle en affaire.

 

La clause de non-divulgation

Si la clause de non-concurrence doit être limitée dans le temps et le lieu, la clause de non-divulgation, elle, subsiste toujours et partout. En effet, l'usage d'informations confidentielles que l'ex-employé a acquises dans son ancien emploi est strictement prohibé. Pour être considérée comme confidentielle, l'information doit être privilégiée, c’est-à-dire inconnue de la plupart des gens externes à l’entreprise et difficile à connaître ou à apprendre.

Il faut noter que cette obligation existe sans même qu’une clause contractuelle la stipule, puisqu’elle constitue une des applications du devoir de loyauté.

 

Le devoir de loyauté

En effet, le salarié doit s’astreindre à un devoir de loyauté envers son employeur. Ce devoir comprend, en plus de l’exigence de non-divulgation, l’exécution du travail avec « prudence et diligence ». Malgré l’absence d’une clause de non-concurrence après la fin du lien d’emploi, le devoir de loyauté survit pendant un certain temps après la fin du lien d’emploi, et offre une protection minimale à l’employeur.

Ce devoir de loyauté, pris seul, n'empêche pas l'ex-employé de concurrencer son ancien employeur. Il pourrait même, s’il le souhaite, fonder sa propre entreprise, occuper un nouvel emploi chez un concurrent ou même investir dans une entreprise concurrente. Par contre, cette concurrence doit demeurer loyale et respecter le principe de la bonne foi.

La jurisprudence a établi certains comportements qui transgressent le principe de la bonne foi et qui sont déloyaux. Par exemple, utiliser des documents ou renseignements confidentiels de l'ex-employeur pour solliciter la clientèle, dénigrer l'ancien employeur, profiter d'une certaine relation privilégiée avec la clientèle, solliciter de façon insistante et systématique ses ex-collègues de bureaux, et conserver des biens ou des documents de l'ex-employeur ont été considérés contraires à la bonne foi.

En résumé, le devoir de loyauté protège principalement contre une concurrence déloyale de l'ex-employé et ne protège nullement comme une clause de non-concurrence.

 

Conclusion

Il faut noter que la liste de restrictions susmentionnées est non exhaustive. D’autres règles en la matière existent. Par conséquent, il est fortement recommandé pour un employeur de demander l’expertise d’un professionnel avant de rédiger une telle clause. À défaut de ce faire, la clause pourrait être invalidée et l’employeur pourrait se retrouver sans protection.

 
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