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Édition du 10 décembre 2013 |
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Bonne foi
On parle souvent de bonne foi dans le langage courant. Mais que signifie la bonne foi au sens juridique? Sans avoir de définition exacte, la bonne foi s’entend de l’attitude que l’on emploie lorsque nos agissements sont conformes au droit et qu’ils ne cherchent pas à tromper ou à nuire à autrui . En droit québécois, la bonne foi est consignée aux articles 6, 7 et 1375 du Code civil du Québec.
En vertu de l’article 2805 C.c.Q., la bonne foi se présume toujours. En raison de cette présomption, le fardeau de prouver l’absence de bonne foi ou la mauvaise foi d’une partie repose sur la partie qui allègue la chose. En contrepartie, si cette démonstration peut être faite, divers recours s’ouvrent pour réclamer, entre autres, l’annulation d’un contrat.
Les abus de droit et les abus de procédure sont associés à l’absence de bonne foi. Il ne faut pas pour autant en conclure qu’une partie demanderesse qui perd son recours fait nécessairement preuve de mauvaise foi, bien au contraire. Chacun a droit d’intenter des procédures judiciaires. En théorie, la règle est simple : si ce recours a été institué dans le dessein de faire valoir des droits et la vérité, il sera malaisé de prouver la mauvaise foi. Les tribunaux existent pour trancher les nombreux litiges. Toute autre utilisation du système judiciaire constitue un abus1. En pratique, il peut est très difficile de savoir quel est le but recherché...
Le récent jugement St-Onge c. A&O Gendron inc. est un exemple de mauvaise foi qui a été sanctionnée par le tribunal2. |
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Les actionnaires tous égaux
Le principe est ferme : un actionnaire d’une société par actions, qu’il soit majoritaire ou non, ne peut être avantagé indûment en comparaison de ses coactionnaires. Quiconque contrevient à cette règle ne respecte pas l’exigence de bonne foi et s’expose à être sanctionné pour abus de droit.
Dans l’affaire St-Onge, l’actionnaire qui n’est pas l’un des administrateurs de la société conteste, entre autres, le fait que l’administrateur unique verse un honoraire très élevé à sa compagnie personnelle de gestion, qui est aussi actionnaire, sans aucun motif sérieux. Sur ce point, le demandeur obtient gain de cause, puisque ce geste, sans s’apparenter à une fraude, contrevient au principe d’égalité de traitement entre actionnaires.
Par ailleurs, cette action est aussi contraire à l’obligation de prudence et de diligence à laquelle est tenue l’administrateur. L’administrateur, rappelons-le, doit toujours agir dans le meilleur intérêt de la société et non dans son intérêt propre. Ce principe est codifié à l’article 322 du Code civil du Québec. Dans le même ordre d’idées, l’article 323 C.c.Q. interdit à l’administrateur de confondre les biens de la société par actions avec les siens, ce qui fut le cas en l’espèce. Le professeur Martel souligne d’ailleurs qu’un acte qui contrevient aux dispositions susmentionnées peut être annulé par le tribunal3.
L’administrateur possède une société de portefeuille (holding) qui est elle-même actionnaire de la société qui est exploitée (l’opérante). Il admet que les fonds amassés par sa société de portefeuille serviront à assurer sa retraite. Verser un honoraire démesuré à cette société constitue donc, dans les faits, une absence manifeste de bonne foi4.
Il est primordial de retenir que les administrateurs ne font que contrôler la société par actions; ils ne la possèdent pas. C’est aux actionnaires que revient ce privilège. |
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- Royal Lepage commercial inc. c. 109650 Canada Ltd., 2007 QCCA 915.
- 2013 QCCS 774, [2013] ABD 89. Voir le jugement
- Maurice Martel et Paul Martel, La compagnie au Québec - les aspects juridiques, vol. 1, Montréal, Wilson & Lafleur ltée, à jour en mai 2010, par. 23-199 et 23-200.
- Supra note 2.
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