Relève d'entreprises
Aujourd’hui encore, il est très courant que les entrepreneurs, quand ils quittent le monde des affaires, choisissent de passer les rênes de leur compagnie à un membre de leur famille. Aux fins de l’impôt, les personnes liées sont réputées avoir entre elles un lien de dépendance. Le terme « réputé » fait référence à une présomption très forte qui ne peut pratiquement jamais être renversée. Les membres d’une même famille subissent l’effet de ces articles de la loi.
Quel impact cela a-t-il?
Or, les transactions faites entre personnes ayant un lien de dépendance peuvent avoir de grandes conséquences fiscales. En effet, la Loi de l’impôt sur le revenu stipule qu’une transaction de biens est réputée faite à la « juste valeur marchande ». Aux fins de la loi, les actions d’une compagnie sont considérées comme des biens. L’avantage fiscal qu’une partie peut vouloir conférer à l’autre est donc annulé par cette disposition.
Concrètement, cela signifie que si un père vend son entreprise à son fils pour un montant bien inférieur à sa valeur réelle, il sera imposé non pas sur le gain en capital qu’il a réalisé, mais bien sur la somme qu’il aurait reçue s’il avait transigé à la juste valeur marchande. Si l’entreprise valait en fait 250 000 $ et qu’il l’a vendue pour 50 000 $, il sera quand même imposé sur 250 000 $!
Ce n’est pas tout! L’acquéreur du bien (ici, le fils) qui décide de le revendre ne sera alors pas imposé sur la différence entre la valeur d’achat et la valeur de revente. Il faudra ajouter à cette valeur la différence entre le prix qu’il aurait dû payer pour l’achat et le prix réellement payé. Pour poursuivre l’exemple précédent, le fils qui décide de revendre l’entreprise pour 300 000 $ devra payer de l’impôt sur 250 000 $ (300 000 – 50 000) au lieu de 50 000 $. Il se retrouve donc à payer 250 000 $ alors que cet impôt a déjà été payé par le père!
On constate donc qu’il y a double imposition pour le même montant, ce que la loi cherche normalement à éviter. Conclusion : le but est de punir les avantages causés par les traitements de faveur entre personnes ayant un lien de dépendance.
La notion de contrôle
Toutefois, la notion de personnes liées ne se limite pas aux membres d’une même famille. La loi prévoit en effet que « des particuliers unis par les liens du sang, du mariage, de l’union de fait ou de l’adoption » sont des personnes liées. Mais les compagnies sont aussi des personnes au sens de la loi, et peuvent donc être liées.
Ici intervient la notion de contrôle. En effet, le contrôle d’une compagnie peut être de droit ou de fait. Le contrôle de droit, ou contrôle légal, se réfère à la répartition des actions avec droit de vote de la compagnie : celui ou ceux qui en possèdent la majorité contrôlent la compagnie. Le contrôle de fait est plus complexe.
Sont donc liées, entre autres :1) une société et une personne qui la contrôle, 2) une société et un groupe de personnes liées qui la contrôle, 3) deux sociétés contrôlées par la même personne ou groupe de personnes, 4) deux sociétés alors que chacune est contrôlée par une personne liée à celle qui contrôle l’autre…
Les possibilités peuvent rapidement devenir complexes. Ainsi, supposons que monsieur Tremblay détient 60% des actions votantes de la compagnie Voitures d’occasions Tremblay inc., qui elle-même détient 100% des actions votantes de la compagnie Chaussures de sport Tremblay inc. De son côté, madame Tremblay, sœur de monsieur Tremblay, possède 70% des actions votantes de la compagnie Technologie fine pointe Tremblay inc.
Chaussures de sport Tremblay inc. et Technologie fine pointe Tremblay inc. sont donc des personnes liées et sont par conséquent réputées avoir un lien de dépendance. Elles doivent transiger à la juste valeur marchande, faute de quoi il y aura double imposition sur la juste valeur marchande comme susmentionné.
Lien de dépendance
Par ailleurs, le lien de dépendance n’est pas réservé aux personnes liées : si c’était le cas, deux amis pourraient transiger à un prix avantageux en payant moins d’impôt que nécessaire. Trois principaux critères ont été développés par la jurisprudence pour déterminer s’il y a effectivement un lien de dépendance.
En premier lieu, si un seul cerveau dirige les négociations pour les deux parties, on conclura généralement à un lien de dépendance entre elles. En second lieu, ce sera aussi le cas si les parties agissent dans un intérêt commun. Ainsi, lorsqu’une partie cherche uniquement à transiger pour avantager l’autre, il y aura un lien de dépendance. En dernier lieu, on décidera également en ce sens s’il y a contrôle de fait par une partie sur l’autre.
On choisit ses amis, pas sa famille
Il faut finalement savoir que la vente d’actions permet habituellement une exonération allant jusqu’à 800 000 $ sur le gain en capital. Malheureusement, encore aujourd’hui, le vendeur ne peut bénéficier de cette déduction si la transaction a été faite avec un membre de sa famille.
Les lois fiscales en cette matière sont sévères, mais elles servent à prévenir les fraudes éventuelles. Pour vous assurer que la transmission de votre entreprise se fasse sans accroc aux lois fiscales, contactez-nous au 450-696-1086 ou visitez le www.dupuispaquin.com/droit/droit-fiscal/planification-transactions-affaires. |